Comprendre les FFT et le fenêtrage

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Découvrez le domaine temporel et fréquentiel, les transformées de Fourier rapides (FFT) et le fenêtrage, ainsi que la façon dont vous pouvez les utiliser pour améliorer votre compréhension d’un signal.

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Comprendre le domaine temporel, le domaine fréquentiel et la FFT

La transformée de Fourier peut être puissante pour comprendre les signaux quotidiens et résoudre les erreurs dans les signaux. Bien que la transformée de Fourier soit une fonction mathématique complexe, ce n’est pas un concept difficile à comprendre et à associer à vos signaux mesurés. En termes simples, ce concept dit qu’il est possible de décomposer un signal en ondes sinusoïdales de différentes amplitudes et fréquences. Examinons de plus près ce que cela signifie et pourquoi c’est utile. 

Tous les signaux sont la somme des sinus

Lorsque l’on examine des signaux du monde réel, on les considère généralement comme une tension qui change au fil du temps. C’est ce que l’on appelle le domaine temporel. Le théorème de Fourier stipule que toute waveform dans le domaine temporel peut être représentée par la somme pondérée des sinus et des cosinus. Par exemple, prenons deux signaux sinusoïdaux, dont l’un est trois fois plus rapide que l’autre avec une fréquence égale à 1/3 du premier signal. Lorsqu’on les ajoute, on constate qu’on obtient un signal différent.

Figure 1 : Lorsque l’on ajoute deux signaux, on obtient un nouveau signal.

Maintenant, imaginons que la deuxième onde représente elle aussi 1/3 de l’amplitude. Cette fois, seuls les pics sont affectés.

Figure 2 : Ajuster l’amplitude lors de l’ajout de signaux affecte les pics.

Disons maintenant que nous avons ajouté un troisième signal qui représente 1/5 de l’amplitude et de la fréquence du signal d’origine. Si nous continuons ainsi jusqu’à atteindre le bruit de fond, une waveform reconnaissable apparaît.

Figure 3 : Un signal carré est la somme des sinus.

Nous avons créé un signal carré. De cette façon, tous les signaux dans le domaine temporel peuvent être représentés par une série de sinus.

Bien qu’il soit assez intéressant de pouvoir construire des signaux de cette manière, pourquoi est-ce important ? C’est très simple : s’il est possible de construire un signal en utilisant des sinus, il est également possible de déconstruire des signaux en sinus. Une fois qu’un signal est déconstruit, on peut alors voir et analyser les différentes fréquences qui sont présentes dans le signal d’origine. Voici quelques exemples dans lesquels la capacité de déconstruire un signal s’est avérée utile :

  • En déconstruisant les ondes radio, on peut choisir la fréquence (ou la station) que l’on veut écouter.
  • En déconstruisant des ondes audio en différentes fréquences telles que les graves et les aigus, on peut modifier les tons ou les fréquences pour amplifier certains sons et supprimer le bruit indésirable.
  • En déconstruisant les vibrations des tremblements de terre de vitesses et de forces variables,on peut optimiser la conception des bâtiments et éviter les vibrations les plus fortes.
  • En déconstruisant les données de l’ordinateur, on peut ignorer les fréquences les moins importantes et créer des représentations plus compactes dans la mémoire, ce que l’on appelle aussi la compression de fichiers.

Déconstruire des signaux à l’aide de la FFT

La transformée de Fourier déconstruit une représentation du domaine temporel d’un signal en représentation du domaine fréquentiel. Le domaine de fréquence montre les tensions présentes à des fréquences variables. C’est une façon différente de regarder un même signal. 

Un numériseur échantillonne une waveform et la transforme en valeurs discrètes. À cause de cette transformation, la transformée de Fourier ne fonctionnera pas sur ces données. À la place, on utilise la transformée de Fourier discrète (DFT). Cette dernière produit les composantes du domaine fréquentiel en valeurs discrètes, ou intervalles. La FFT (fast Fourier transform, en anglais) est une implémentation optimisée d’une DFT ; elle nécessite moins de calculs, mais ne fait essentiellement que déconstruire un signal.

Observez le signal de la figure 1 ci-dessus. Il y a deux signaux qui possèdent deux fréquences différentes. Dans le cas présent, le signal présente deux pics dans le domaine fréquentiel : un à chacune des deux fréquences des sinus qui composaient le signal à l’origine.

Figure 4 : Lorsque deux signaux sinusoïdaux d’amplitude égale sont additionnés, ils produisent deux pics dans le domaine fréquentiel.

L’amplitude du signal d’origine est représentée sur l’axe vertical. Si l’on observe le signal de la figure 2 ci-dessus (où deux signaux différents possèdent différentes amplitudes), on constate que le pic le plus important correspond à la fréquence du signal sinusoïdal de tension le plus élevé. En observant un signal dans le domaine temporel et en analysant les fréquences auxquelles les signaux de tension les plus élevés se produisent, on peut avoir une bonne idée du signal d’origine.

Figure 5 : Le pic le plus élevé est la fréquence de la plus grande amplitude.

Il peut aussi être utile d’examiner la forme du signal dans le domaine fréquentiel. Par exemple, examinons le signal carré dans le domaine fréquentiel. Un peu plus tôt, nous avons réussi à créer un signal carré en utilisant de nombreux signaux sinusoïdaux à différentes fréquences. Ainsi, on pourrait s’attendre à trouver de nombreux pics de signal dans le domaine fréquentiel, un pour chaque signal ajouté. La présence d’une rampe marquée dans le domaine fréquentiel indique que le signal d’origine était un signal carré.

Figure 6 : Le domaine fréquentiel d’un signal sinusoïdal ressemble à une rampe.

Mais dans le monde réel, à quoi ça ressemble ? De nombreux oscilloscopes à signaux mixtes (MSO) ont une fonction FFT. Ci-dessous, on peut voir à quoi ressemble la FFT d’un signal carré sur un graphe de signaux mixtes. En effectuant un zoom avant, on peut voir les pics individuels dans le domaine fréquentiel.

Figure 7 : Le signal sinusoïdal d’origine et sa FFT correspondante sont affichés dans A, tandis que B est une zone agrandie de la FFT dans laquelle il est possible de distinguer les pics individuels.

L’examen des signaux dans le domaine fréquentiel peut être utile lors de la validation et du dépannage des signaux. Supposons, par exemple, qu’un circuit est censé produire un signal sinusoïdal. À la figure 8 ci-dessous, on peut visualiser le signal en sortie sur l’oscilloscope dans le domaine temporel. Il a l’air correct !

Figure 8 : Si l’on additionnait ces deux ondes, en raison de leur similitude, elles créeraient une onde sinusoïdale parfaite.

Cependant, lorsque l’on affiche un signal dans le domaine fréquentiel, on ne s’attend à voir qu’un seul pic. En effet, la logique voudrait que l’on génère un seul signal sinusoïdal à une seule fréquence. Mais on observe ici un pic plus petit à une fréquence plus élevée : cela indique que le signal sinusoïdal n’est pas aussi bon que prévu. Pour éliminer la cause du bruit ajouté à cette fréquence particulière, il faut retravailler le circuit. Le domaine fréquentiel est idéal pour déterminer si un signal propre dans le domaine temporel contient réellement des interférences, du bruit ou du jitter.

Figure 9 : En observant le signal sinusoïdal apparemment parfait de la figure 8, on remarque la présence d’une impulsion transitoire.

 

Fenêtrage

Bien que l’exécution d’une FFT sur un signal puisse être très utile, il est important de connaître les limites de la FFT et de savoir comment améliorer la clarté du signal en utilisant le fenêtrage.

Qu’est-ce que le fenêtrage ?

Lorsque l’on utilise la FFT pour mesurer la composante fréquentielle d’un signal, on base l’analyse sur un ensemble fini de données. La transformée FFT réelle fait l’hypothèse qu’il s’agit d’un ensemble de données fini, un spectre continu qui correspond à une période d’un signal périodique. Pour la FFT, le domaine temporel et le domaine fréquentiel sont des topologies circulaires : les deux extrémités du signal temporel sont interprétées comme si elles étaient connectées l’une à l’autre. Lorsque le signal mesuré est périodique et qu’un nombre entier de périodes remplit l’intervalle de temps d’acquisition, la FFT s’avère correcte car elle correspond à l’hypothèse de base.

Mesurer un nombre entier de périodes (A) donne une FFT idéale (B)

Figure 10 : Mesurer un nombre entier de périodes (A) donne une FFT idéale (B).

Cependant, souvent, le signal mesuré n’est pas un nombre entier de périodes. Par conséquent, si le signal mesuré est fini, on peut voir apparaître une waveform tronquée qui présente des caractéristiques différentes du signal à temps continu d’origine. En outre, la finitude peut introduire des changements de transition brusques dans le signal mesuré. Les transitions brusques sont des discontinuités.

Lorsque le nombre de périodes dans l’acquisition n’est pas un entier, les extrémités sont discontinues. Ces discontinuités artificielles apparaissent dans la FFT sous forme de composantes haute fréquence qui ne sont pas présentes dans le signal d’origine. Ces fréquences peuvent être beaucoup plus élevées que la fréquence de Nyquist et sont repliées entre 0 et la moitié de la fréquence d’échantillonnage. Par conséquent, le spectre obtenu en utilisant une FFT n’est pas le spectre réel du signal d’origine, mais une version étalée. C’est comme si l’énergie à une fréquence donnée s’infiltrait dans d’autres fréquences. Ce phénomène est connu sous le nom de fuite spectrale ; il provoque la propagation de raies spectrales fines dans des signaux plus larges.

Mesurer un nombre non entier de périodes (A) ajoute une fuite spectrale à la FFT (B)

Figure 11 : Mesurer un nombre non entier de périodes (A) ajoute une fuite spectrale à la FFT (B). 

En utilisant une technique appelée fenêtrage, il est possible de minimiser les effets d’une FFT sur un nombre non entier de cycles. Le fenêtrage réduit l’amplitude des discontinuités aux limites de chaque séquence finie acquise par le numériseur. Le fenêtrage consiste à multiplier l’enregistrement de temps par une fenêtre de longueur finie. Cette fenêtre possède une amplitude qui varie progressivement vers zéro aux extrémités. Cela permet aux extrémités de la waveform de se rencontrer et, par conséquent, d’obtenir une waveform continue sans transitions brusques. Cette technique est aussi appelée application d’une fenêtre.

Figure 12 : L’application d’une fenêtre minimise l’effet de la fuite spectrale.

Fonctions de fenêtrage

Il existe plusieurs types de fonctions de fenêtre que vous pouvez appliquer en fonction du signal. Pour comprendre comment une fenêtre donnée affecte le spectre de fréquence, il faut s’intéresser aux caractéristiques de fréquence des fenêtres. 

Le tracé réel d’une fenêtre montre que la caractéristique de fréquence d’une fenêtre est un spectre continu avec un lobe principal et plusieurs lobes latéraux. Le lobe principal est centré à chaque composante de fréquence du signal temporel, tandis que les lobes latéraux approchent de zéro. La hauteur des lobes latéraux indique l’effet de la fonction de fenêtrage sur les fréquences situées autour des lobes principaux. La réponse des lobes latéraux d’un signal sinusoïdal puissant peut surpasser la réponse du lobe principal d’un autre signal sinusoïdal faible situé à proximité. Typiquement, les lobes latéraux inférieurs réduisent les fuites dans la FFT mesurée, mais ils augmentent la bande passante du lobe principal. Le taux de roll off des lobes latéraux est le taux de décroissance asymptotique des pics des lobes latéraux. En augmentant le taux de roll off des lobes latéraux, on peut réduire les fuites spectrales.

La sélection d’une fonction de fenêtrage n’est pas une tâche simple. Chaque fonction de fenêtrage a ses propres caractéristiques et s’adapte à différentes applications. Pour choisir une fonction de fenêtrage, il convient d’estimer le contenu fréquentiel du signal.

  • Si le signal contient de fortes composantes de fréquence interférentes qui s’éloignent de la fréquence d’intérêt, il est préférable de choisir une fenêtre de lissage avec un taux de roll off élevé du lobe latéral.
  • Si le signal contient de forts signaux d’interférence près de la fréquence d’intérêt, il vaut mieux choisir une fonction de fenêtre avec un niveau de lobe latéral maximum bas.
  • Si la fréquence d’intérêt contient deux signaux ou plus très proches l’un de l’autre, la résolution spectrale est importante. Dans ce cas, il est préférable de choisir une fenêtre de lissage avec un lobe principal très étroit.
  • Si l’exactitude de l’amplitude d’une composante de fréquence unique est plus importante que l’emplacement exact de la composante dans un intervalle de fréquence donné, on choisira une fenêtre avec un lobe principal large.
  • Si le spectre du signal est plutôt plat ou large bande, une fenêtre uniforme conviendra. Dans ce cas, on peut aussi ne pas utiliser de fenêtre.
  • En général, la fenêtre de Hanning (Hann) convient dans 95 % des cas. Elle offre une bonne résolution de fréquence et minimise la fuite spectrale. Si vous ne connaissez pas la nature du signal, mais que vous voulez appliquer une fenêtre de lissage, commencez par utiliser une fenêtre de Hann.

Même si vous n’utilisez pas de fenêtre, le signal est convolué avec une fenêtre de forme rectangulaire et de hauteur uniforme. En effet, il est nécessaire de prendre un instantané du signal en entrée et de travailler avec un signal discret. Cette convolution a un spectre caractéristique de fonction sinusoïdale. C’est pourquoi le fait de n’appliquer aucune fenêtre est souvent appelé « fenêtre uniforme ou rectangulaire », car il existe toujours un effet de fenêtrage.

Les fonctions de fenêtrage de Hamming et de Hann ont toutes deux une forme sinusoïdale. Les deux fenêtres produisent un pic large mais des lobes latéraux bas. Toutefois, la fenêtre de Hann atteint zéro aux deux extrémités, éliminant ainsi toute discontinuité. La fenêtre de Hamming n’atteint pas tout à fait zéro et présente donc encore une légère discontinuité dans le signal. En raison de cette différence, la fenêtre de Hamming est idéale pour annuler le lobe latéral le plus proche, mais pas pour annuler les autres lobes. Ces fonctions de fenêtrage sont utiles pour mesurer le bruit avec une meilleure résolution de fréquence, pourvu que des lobes latéraux modérés ne posent pas de problème.

Les fenêtrages de Hamming et de Hann produisent un pic large ainsi que des lobes latéraux bas marqués.

Figure 13 : Les fenêtrages de Hamming et de Hann produisent un pic large ainsi que des lobes latéraux bas marqués.

La fenêtre de Blackman-Harris est semblable aux fenêtres de Hamming et de Hann. Le spectre résultant présente un pic large, mais une bonne compression des lobes latéraux. Il existe deux types principaux pour cette fenêtre. La fenêtre de Blackman-Harris à 4 termes est une bonne fenêtre d’usage général. Elle rejette les lobes latéraux dans les 90 dB et présente un lobe principal modérément large. La fonction de fenêtre de Blackman-Harris à 7 termes, quant à elle, offre toute la gamme dynamique dont vous avez besoin, mais son lobe principal est large.

La fenêtre de Blackman-Harris produit un pic large, mais elle compresse bien les lobes latéraux.

Figure 14 : La fenêtre de Blackman-Harris produit un pic large, mais elle compresse bien les lobes latéraux.

La fenêtre de Kaiser-Bessel réussit à trouver un équilibre entre les différents objectifs contradictoires d’exactitude d’amplitude, de distance des lobes latéraux et de hauteur des lobes latéraux. Elle est comparable aux fonctions de fenêtre de Blackman-Harris, mais pour une même largeur du lobe principal, ses lobes latéraux proches ont tendance à être plus hauts, tandis que ses lobes latéraux plus éloignés sont plus bas. Avec cette fenêtre, on obtient souvent des signaux proches du bruit de fond.

La fenêtre à profil plat est également sinusoïdale, mais elle franchit la ligne du zéro. Cela génère un pic beaucoup plus large dans le domaine fréquentiel, qui est plus proche de l’amplitude réelle du signal qu’avec d’autres fenêtres. 

Figure 15 : La fenêtre à profil plat donne des informations plus précises sur l’amplitude.

Ce ne sont là que quelques-unes des fonctions de fenêtre possibles. Il n’existe pas d’approche universelle pour sélectionner une fonction de fenêtrage. Cependant, le tableau ci-dessous peut vous aider dans votre choix initial. Comparez toujours les performances des différentes fonctions de fenêtrage pour trouver celle qui convient le mieux à l’application.

 

Contenu du signalFenêtre
Signal sinusoïdal ou combinaison de signaux sinusoïdauxHann
Signal sinusoïdal (l’exactitude de l’amplitude est importante)Profil plat
Signal aléatoire à bande étroite (données de vibration)Hann
Signal aléatoire à large bande (bruit blanc)Uniforme
Ondes sinusoïdales rapprochéesUniforme, Hamming
Signaux d’excitation (marteau d’impact)Force
Signaux de réponseExponentielle
Contenu inconnuHann
Signal sinusoïdal ou combinaison de signaux sinusoïdauxHann
Signal sinusoïdal (l’exactitude de l’amplitude est importante)Profil plat
Signal aléatoire à bande étroite (données de vibration)Hann
Signal aléatoire à large bande (bruit blanc)Uniforme
Deux tons avec des fréquences proches mais des amplitudes très différentesKaiser-Bessel
Deux tons avec des fréquences proches et des amplitudes presque égalesUniforme
Mesures précises d’amplitude de ton uniqueProfil plat

Résumé

  • Tous les signaux dans le domaine temporel peuvent être représentés par une série de sinus.
  • Une transformée FFT déconstruit une représentation du domaine temporel d’un signal en représentation du domaine fréquentiel. Cela permet ainsi d’analyser les différentes fréquences d’un signal.
  • Le domaine fréquentiel est idéal pour déterminer si un signal propre dans le domaine temporel contient réellement des interférences, du bruit ou du jitter.
  • La fuite spectrale est causée par des discontinuités dans le signal d’origine lorsque le nombre de périodes n’est pas un entier. En utilisant un fenêtrage, il est possible de corriger ce phénomène.
  • Le fenêtrage réduit l’amplitude des discontinuités aux extrémités de chaque séquence finie acquise par le numériseur.
  • Le fait de n’appliquer aucune fenêtre est souvent appelé « fenêtre uniforme ou rectangulaire », car il existe toujours un effet de fenêtrage.
  • En général, la fenêtre de Hanning convient dans 95 % des cas. Elle offre une bonne résolution de fréquence et minimise la fuite spectrale.
  • Il faut toujours comparer les performances des différentes fonctions de fenêtrage pour trouver celle qui convient le mieux à l’application.

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